Modalité de la rencontre entre voyageur et autochtones
Question 1
À quelle difficulté majeure ont dû faire face les tout premiers découvreurs de nouveaux mondes ?
Question 2
Comparez la façon dont Jacques Cartier et Jean de Léry relatent leur découverte avec l’altérité.
1 Jacques Cartier Relation du voyage de 1534
dessandismes deux hommes à terre pour aller à eulx leurs portez des cousteaulx et aulstres ferremens et un chappeau rouge pour donnez à [leur] cappitaine. Et eulx voyant ce dessandirent partie d’eulx à terre avecques desdites peaulx et traficquerent ensemble et demenerent une grande et merveilleusse joye d’avoir et recouvrer desdits ferremens et aulstres chosses dansans et faissant plusieurs serymonies en gectant de la mer sur leurs testes avecques leurs mains et nous baillerent tout ce qu’ilz avoint tellement qu’ilz s’en retournerent touz [nuz] sans aulcune chose avoir sur eulx.
2. Jean de Léry Histoire d’un voyage, 1578
Combien que nos Toüoupinambaoults reçoivent fort humainement les estrangers amis qui les vont visiter, si est-ce néantmoins que les François et autres de par-deçà qui n’entendent pas leur langage, se trouvent du commencement merveilleusement estonnez parmi eux. […] me voyant tout incontinent environné de sauvages, lesquels me demandoyent, Marapé-dereré, marapé-dereré, c’est-à-dire, Comment as-tu nom, comment as-tu nom, (à quoy pour lors je n’entendois que le haut Allemand) et au reste l’un ayant pris mon chapeau qu’il mit sur sa teste, l’autre mon espée et ma ceinture qu’il ceignit sur son corps tout nud, l’autre ma casaque qu’il vestit : eux, di-je m’estourdissans de leurs crieries et courans de ceste façon parmi leurs villages avec mes hardes, non seulement je pensois avoir tout perdu, mais aussi je ne savois où j’en estois. Mais comme l’experience m’a monstré plusieurs fois depuis, ce n’estoit que faute de savoir leur maniere de faire.
Il est vrai que le lieu et le temps aidaient fort à ce ravissement dévotieux ; car quand je me considérais être sur le mont où mon Rédempteur a souffert pour moi une si cruelle mort et voyant des yeux du corps le même lieu où la Croix avait été plantée, et de ceux de l’âme regardant le Crucifié mourant pour moi en icelle, et me représentant tout ceci durant une sombre nuit, sous le cours de laquelle toutes les créatures gardent le silence, conduites à ce faire par les ombres nocturnes que je voyais à demi-rompues et bannies de ce temple par la lumière naissante d’une confuse quantité de lampes éparses par l’église çà et là, je me sentais triste, morne et pensif. Mais quand mon oreille venait à recevoir le son et le doux soupirant accent de cette voix grecque, qui m’enchantait en chantant des hymnes et des cantiques sacrés en sa langue, avec des roulements qui ne sentaient rien de lascif ni de voluptueux, mais qui étaient tous angéliques et célestes, j’étais alors si ravi et si transporté en je ne sais quelles divines considérations, qui m’arrachaient avec une douce violence les larmes des yeux, les soupirs de l’estomac, les pensées du cœur, et le cœur du monde, que je devenais presque insensible et si fort hors de moi que je demeurais sur ce mont jusqu’au jour, sans avoir dit un seul mot de prière vocale, ne pensant pas y avoir été une demi-heure seulement…