Fatigue : aspects psychophysiologiques

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Evolution des paramètres physiologiques au cours d'un exercice réalisé à la puissance critique jusqu'à épuisement :

Voici les résultats expérimentaux d'une étude dont l'objectif était de comprendre le processus de la fatigue à une intensité particulière: la puissance critique. Particulière car la puissance critique n'est pas significativement différente de l'intensité au 2ème seuil ventilatoire largement utilisée dans le suivi médico-sportif pour déterminer la zone de transition aérobie/anaérobie. Cette étude visait plus précisément à déterminer la durée pendant laquelle des sportifs étaient capables de maintenir un exercice à cette intensité, et de comprendre les processus physiologiques contribuant à son arrêt. Cette étude a fait l'objet d'une publication en 2005 (Baron et al., 2005).

MéthodeMéthode

8 triathlètes masculins de niveau régional ont participé à cette étude. Le protocole a été réalisé sur un ergocycle et comportait: 1 exercice incrémenté afin de déterminer les paramètres physiologiques maximaux tel que la PMA, le VO2max ou la FCmax. 4 tests menés jusqu'à épuisement à différentes intensités afin de déterminer la puissance critique. Et enfin, un test à cette intensité pour déterminer le temps de maintien et observer les paramètres de la fatigue.

Lors du dernier test, mené à la puissance critique, des paramètres sanguins ont été mesurés toutes les 5 min et à l'arrêt de l'exercice. Les paramètres ventilatoires et la fréquence cardiaque ont été mesurés en continu.

Résultats et discussion

Les résultats du test incrémenté révèlent une Puissance maximale aérobie, définie comme la plus petite puissance permettant d'atteindre VO2max, de 342 Watts environ. La consommation maximale d'oxygène et la fréquence cardiaque maximale sont approximativement de 50 ml/min/kg et 184 batt/min. La puissance critique, déterminée lors des différents tests de temps limites et qui correspond à l'asymptote de la relation puissance-temps ou à la pente de la droite travail-temps se situe à environ 85% de VO2max. La puissance critique a pu être maintenue pendant 22 min environ. Les adaptations métaboliques ont été observées entre la 10ème et la dernière minutes du test réalisé à la puissance critique. Les résultats montrent une évolution significative de la lactatémie, du rapport lactate / pyruvate et de la concentration en ions ammoni (figure 1).

Figure 1 : Evolution des paramètres métaboliques au cours du test réalisé à la puissance critique :

Figure 1 : Evolution des paramètres métaboliques au cours du test réalisé à la puissance

De même, l'évolution de l'équilibre acido-basique a été étudiée (figure 2).

Figure 2 : Evolution des paramètres de l'équilibre acido-basique au cours du test réalisé à la puissance critique :

Figure 2 : Evolution des paramètres de l'équilibre acido-basique au cours du test réalisé

Les résultats vont dans le sens d'une importante acidose métabolique non compensé. Après une nette diminution entre le début et la 10ème minute, le pH se stabilise mais à des valeurs très faibles de l'ordre de 7,28. La pression artérielle en CO2 ainsi que la concentration en ions bicarbonates diminue significativement. Les paramètres ventilatoires et la fréquence cardiaque ont été mesurés en continu. Leur évolution a été analysée entre 10 et 100% du temps de maintien à la puissance critique. Les résultats montrent que le débit ventilatoire et la fréquence respiratoire augmentent significativement. Le débit ventilatoire reste néanmoins inférieur aux valeurs mesurées à la fin du test incrémenté. Les valeurs de fréquence respiratoire par contre ne sont pas significativement différentes des valeurs maximales. Les valeurs de la consommation d'oxygène et du rejet en dioxyde de carbone n'augmentent pas significativement. Mais les valeurs moyennes de VO2 sont supérieurs aux valeurs attendues. Cela témoigne du phénomène de composante lente. Une des hypothèses physiologique retenue pour ce mécanisme correspond au recrutement d'unités motrices supplémentaires pour tenter de palier à la diminution de la puissance soutenue lors de l'apparition de la fatigue. La fréquence cardiaque enfin augmente significativement jusqu'à atteindre les valeurs maximales mesurées lors du test incrémenté. Au final, on peut retenir que l'arrêt de l'exercice est observé après 22 min d'exercice environ. Il survient dans des conditions d'acidose métabolique importante. De même, une concentration importante en ions lactates et ammoni, reconnus comme facteurs de la fatigue, est observée.

Enfin, les systèmes cardiovasculaires et ventilatoires ont atteints leurs limites adaptatives maximales au moment de l'arrêt. Les résultats de cette étude réalisée à la puissance critique sont donc tout à fait en accord avec le paradigme « catastrophe ». Ils ne permettent en aucun cas de le remettre en cause ou de douter de sa validité.

ComplémentRéférences

Baron, B., Dekerle, J., Robin, S., Neviere, R., Dupont, L., Matran, R., et al. (2005). Physiological responses during exercise performed to exhaustion at critical power. Journal of Human Movement Studies, 49, 169-180.

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